Le luxe connaît une période de turbulences… Comment peut-il se réinventer ?
Quand je parlais il y a vingt ans de la résilience du luxe, ce n’était pas dans l’absolu. C’était au regard des crises qu’il avait traversées. Je constate que le secteur avait une illusion d’invincibilité. Il pensait intrinsèquement qu’il était insubmersible. Depuis deux ans, nous assistons à une remise en cause profonde du luxe et à une véritable crise identitaire. Son essence même est discutée. Avant, il y avait cette idée de l’extension permanente du domaine du luxe, portée par toujours plus de nouveaux produits, de nouveaux secteurs, la création de nouvelles branches d’activité, qui ne s’arrêtait jamais. Aujourd’hui, le luxe doit rassurer sur sa capacité à gagner de nouveaux clients et à conserver ses marges. Il nage en plein paradoxe : les investisseurs financiers veulent leurs 9 % de croissance par an, mais parallèlement, les clients demandent plus d’exclusivité et d’authenticité.

Comment surmonter ce paradoxe ?
Nous assistons à un nouveau phénomène, car la cible « affluent » du luxe consomme moins d’objets et davantage de luxe expérientiel. Elle se passionne aussi pour des marques comme Coach qui récupèrent la Gen Z et dont le comportement est très nouveau et différent. Le luxe reste très désirable pour les HNWI qui lui demeurent fidèles, et avec lesquels il doit consolider sa relation. Mais il doit répondre aux besoins des autres consommateurs. Recréer de la valeur à leurs yeux, remettre au cœur la créativité, l’artisanat contemporain, les savoir-faire et explorer de nouvelles opportunités. Il faut aussi retrouver de la cohérence, entre les lignes féminines et masculines d’une même marque, entre la boutique et le service client, entre un mix produit et ce que veulent les clients. Dans une période de questionnement, il faut se réinventer et susciter des chocs culturels.
Lesquels ?
Les marques de luxe ont de nombreuses cartes en main. Elles doivent d’abord réinsuffler du désir en remettant en avant la créativité, le développement de nouveaux produits au lieu d’itérations de leurs icônes classiques, innover, prendre des risques. À ce titre, je trouve le mercato des créateurs cette année assez encourageant. Chanel a été attaqué et a particulièrement bien réagi. Le nouveau directeur artistique est un génie de l’audace, un chef d’orchestre de l’artisanat contemporain, de la créativité. J’y crois beaucoup. De la même manière, l’arrivée très commentée de Luca de Meo, l’ancien patron de Renault, à la tête de Kering, est une très bonne nouvelle qui rebat les cartes. D’ailleurs, le second atout que les Maisons de luxe possèdent, c’est la clientèle primo-accédante. Elles ne doivent surtout pas la laisser tomber et s’imposer de ne pas baisser les prix des collections classiques. À la destination de la clientèle aisée, mais pas ultra-riche, il faut proposer des nouveautés, à des prix plus accessibles, avec du travail et de la créativité. C’est un long process qui prend au moins trois ans. Mais proposer une nouvelle offre access permettra au luxe d’éviter de tomber dans le piège.

Quel secteur du luxe pourrait le plus bénéficier d’un retour à la croissance ?
Chez les plus riches a émergé l’idée du luxe transformatif, expérientiel, qui a pour but d’accroître leur santé, leur longévité. Ils ont l’obsession de la jeunesse, de la forme, du corps, ils veulent vivre plus longtemps, plus jeunes et en bonne santé. Ils ne recherchent rien de moins que la vie éternelle. Le luxe de demain sera une fusion entre la beauté, la santé et l’hospitalité. Les hôtels de luxe ont une carte à jouer, car les clients sont de plus en plus nombreux à vouloir s’offrir 15 jours dédiés à des soins sur mesure, avec du coaching, de la diététique, qu’ils peuvent payer 20, 30 ou 40 000 euros. De surcroît, une fois qu’ils sont fidélisés par la clinique La Prairie, le spa Chesnot ou Valmont, ce sont des choses que l’on peut développer dans tous les hubs, de Dubaï à New York en passant par Londres ou Milan. Ce luxe qui promet une cure de jouvence, c’est le premier gisement de croissance. Il est déjà enclenché et la question est plutôt de savoir qui va gagner la partie : Louis Vuitton, des géants de la beauté comme Estée Lauder ou Lancôme, ou des spécialistes du soin de niche comme La Prairie ? Les clients les plus riches sont déjà très demandeurs, alors qu’ils n’ont pas besoin d’une nouvelle montre ou d’un sac à main de plus.
Ce que vous évoquez, c’est un changement de paradigme ?
Depuis vingt ans, le centre de gravité du luxe, c’était la mode, les vêtements et les accessoires. Aujourd’hui, il y a une transition, en ligne avec les valeurs de la Gen Z qui est moins matérialiste, et tournée vers la beauté, enrichie d’hospitalité, d’exclusivité, de sur-mesure et de tech. C’est inévitable. Mais quel sera l’acteur qui sera le plus performant ? Les marques les plus prégnantes ou les pure players ?
Luxe et Résilience, paru aux Éditions Dunod
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