C’est un élixir dont seule une poignée de privilégiés a goûté une larme, début octobre, à Londres. La soirée de gala se déroulait dans un palace du quartier de Whitewall, à la table étoilée du chef Mauro Colagreco, où le négociant Camus présentait sa dernière création : « L Île Cognac ». Le breuvage de soixante-cinq ans d’âge mêlerait des notes d’iris et de lilas, de cannelle et d’agrumes. Nous n’avons pas goûté mais admiré l’écrin. Et quel écrin !
Camus la Grande Marque
Du cristal, du cuivre, de l’aluminium. Trois carafes en suspension dans un déluge de fleurs. Un guéridon Art nouveau au plateau doté d’un ingénieux système de verres suspendus. Prix public : 85 000 euros TTC, flacons, meuble et accessoires inclus. Seules cinq pièces sont disponibles. La création s’inspire de l’univers de Jules Verne, dont le premier roman « Cinq semaines en ballon », fut publié en 1863, date de la création de la société Camus à Cognac.
« Hautement désirable »
En 162 ans d’histoire, Camus a navigué sous tous les cieux, parfois par gros temps. L’entreprise, toujours familiale, a récemment frôlé le crash. Malmenée par la fermeture des boutiques des aéroports pendant la crise du Covid, elle a dû licencier en 2020 et changer de plan de vol. Priorité à la valeur, moins aux volumes ! La nouvelle stratégie ? « Imposer Camus comme un grand nom de l’artisanat du luxe. Présenter des cognacs hautement désirables à une clientèle ciblée, au bon moment et au bon endroit », expliquait le président Cyril Camus en 2021.
Cette année-là, l’arrière-arrière-petit-fils du créateur soufflait 50 bougies. Il dévoilait le « fer de lance » de la relance : des ateliers à Cognac, dont la petite équipe maîtrise progressivement tous les savoir-faire manufacturiers – travail du verre, du cuir, du bois et de tous les matériaux nobles.
Anne Lacaud
L’une des premières créations, « Jubilee 5.50 Camus », était constituée de 45 coffrets exclusifs (29 800 euros pièce) et cinq bureaux en titane, aluminium anodisé et acier inoxydable (78 000 euros). Le meuble serti de pierres semi-précieuses était équipé d’un système de vérins libérant une carafe offerte comme un calice…
Anne Lacaud
« Un peu façon James Bond », disent en souriant Isabelle Collignon et Florence Bayle, la directrice et la cheffe de projet des Ateliers Camus. « Nous ne nous imposons aucune limite, si ce n’est celle de l’écoconception. Il convient aussi que le goût des cognacs dialogue avec l’imaginaire des pièces créées. Sans cela pas d’émotion. Les choix de notre maître de chai Julie Landreau sont ici primordiaux. »
30 à 40 pièces par an
Exemple avec la série « Poets & Birds » (poètes et oiseaux) : 18 carafes habillées par la plumassière Janaïna Milheiro (38 000 euros pièce). La grue du Japon sublime l’élégance des eaux-de-vie des Borderies ; le phénix, l’éternelle jeunesse d’un assemblage hors d’âge ; et l’ibis rouge, l’équilibre du cépage ugni blanc.
Nous ne nous comparons plus à nos collègues et concurrents à Cognac, mais aux marques comme Hermès, Lanvin ou Van Cleef
Même approche avec « Ode à la nature », dont les nectars célèbrent les quatre éléments, eau, feu, terre et air (65 000 euros pièce). « L’Air », par exemple, met en scène un cognac micro-oxygéné et à la réduction alcoolique naturelle, sans le moindre ajout d’eau distillée…
Camus la Grande Marque
« L’équipe des ateliers compte huit salariés en mesure de concevoir et façonner 30 à 40 pièces par an », détaille Charles Mahieu, le responsable de l’unité de production, qui, à terme, devrait assurer 10 % du chiffre d’affaires de la maison.
Anne Lacaud
« Nous ne nous comparons plus à nos collègues et concurrents à Cognac, mais aux marques comme Hermès, Lanvin ou Van Cleef. Comme dans la joaillerie et la haute couture, nos objets de collection rendent les références de notre gamme classique plus attractives. Ils ont aussi de beaux packagings et une grande intensité aromatique », ajoute Cyril Camus.
Anne Lacaud
Pari gagnant ?
À l’automne 2022, le patron déclarait à « Sud Ouest » que l’entreprise retrouvait la « profitabilité ». Or aujourd’hui, le marché du cognac essuie la bourrasque. Marché américain en berne. Surtaxes à la frontière chinoise. C’est la crise et la région se résout à arracher de la vigne. Faut-il encore miser sur l’ultra-luxe ?
Anne Lacaud
« Plus que jamais, répond Cyril Camus. La situation délicate et l’impact des taxes chinoises ne font que renforcer la pertinence de notre stratégie de montée vers le luxe. Ce dernier souffre moins de la conjoncture et offre de réelles poches de croissance. Certes, certains lourds investissements comme l’ouverture de nouveaux showrooms et de boutiques sont reportés, mais nous accélérons l’intégration de nouveaux savoir-faire.
Aux ateliers, nous savons depuis peu dorer nos gravures sur verre. Plus que jamais, les ateliers témoignent de notre volonté d’aller de l’avant, même dans un environnement très défavorable. »
Anne Lacaud
Une société familiale de 130 salariés en France
Créée en 1863 par Jean-Baptiste Camus (1828-1898), l’entreprise Camus a toujours été indépendante et familiale. Camus la Grande Marque (nom dûment déposé) est très appréciée en Asie. Cyril Camus, le président, vit d’ailleurs la moitié de l’année à Shanghai. La Chine demeure le premier marché de l’entreprise, devant les États-Unis et l’Europe.
La société occupait aussi de solides positions en Russie, où la légende veut que Gaston, fils de Jean-Baptiste, ait chassé l’ours blanc avec le tsar Nicolas II. Évidemment, les affaires ont chuté depuis la guerre en Ukraine, mais la maison ne s’est pas retirée de Russie, où, conformément aux mesures de restriction, il est possible d’exporter des bouteilles d’une valeur de moins de 300 euros. « Nous avons fait le choix du peuple, pas de son dirigeant », dit Cyril Camus.
Le négociant compte 300 salariés dans le monde, dont 130 en France. Il travaille avec 200 viticulteurs en Charente et Charente-Maritime, qui lui vendent vins et eaux-de-vie. Camus passe pour la plus importante des « petites » maisons de cognac, derrière Hennessy, Martell, Rémy Martin, Courvoisier et Château Otard.
Anne Lacaud
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