Rendre l’investissement dans l’immobilier de luxe accessible à tous : c’est l’objectif affiché de la famille Kretz, de la célèbre série L’Agence, qui lance sa plateforme de crowdfunding immobilier. Mais le segment du luxe constitue-t-il une vraie parade contre les difficultés du secteur ?
© Hugo Richard – Le Kretz club s’adresse t-il vraiment à tout le monde ?
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Vous aussi, vous avez eu des étoiles plein les yeux devant la série L’Agence ? Depuis, vous vous rêvez peut-être secrètement en agent immobilier de luxe. Un fantasme désormais accessible au grand public puisque la famille Kretz vient de lancer une plateforme de crowdfunding immobilier ouverte aux particuliers, en partenariat avec un acteur historique et leader du secteur, Clubfunding. Le but : permettre à des investisseurs de participer à leurs côtés à des projets immobiliers de prestige à partir de 1 000 euros.
Plus précisément, «il s’agira au départ de financer surtout des opérations de marchands de biens», détaille Alexandre Bruneau, le directeur général du Kretz Club. Autrement dit, les investisseurs participeront à financer l’achat et la rénovation de biens immobiliers de luxe, qui seront au terme de l’opération revendus en espérant dégager une plus-value. Mais se positionner uniquement sur des biens haut de gamme suffira-t-il à assurer le succès desdites opérations ? Le secteur du financement participatif – largement dominé par des projets immobiliers en France – a en effet du plomb dans l’aile depuis plusieurs mois.
La collecte est en chute libre et les retards s’accumulent
Selon les derniers chiffres publiés mi-septembre par Forvis Mazars et France FinTech, pour l’ensemble du crowdfunding en France, 830 millions d’euros ont été collectés au premier semestre, contre 1,1 milliard d’euros à la même période un an plus tôt, soit un repli qui frôle les 25%. Et compte tenu du poids de la pierre dans le secteur du financement participatif, le «crowdimmo» suit la même tendance. Les investisseurs se montrent en effet de plus en plus sélectifs sur les opérations qu’ils décident de financer.
Il faut dire que le pari n’a jamais été aussi risqué : nombre de plateformes sont encore encombrées par un stock de biens achetés ou financés quand les taux étaient bas, et qui ne trouvent pas preneurs maintenant que les taux sont remontés et ont grippé l’ensemble du marché immobilier. «Le crowdfunding n’échappe pas à la réalité économique de ses sous-jacents, en particulier en immobilier. Le taux d’intérêt moyen des opérations augmente, mais pour un placement de plus en plus risqué : les taux de retards et de défaut ne se résorbent pas», résume Bertrand Desportes, associé chez Forvis Mazars.
Une réalité à laquelle compte bien échapper le Kretz club en ne misant que sur des biens de haut standing. Pour Gautier Allard, directeur général de Clubfunding, la correction du marché immobilier est passée, et il y a de toute façon peu de risques que les biens sélectionnés leur restent sur les bras «car les acquéreurs de ce type d’actifs sont moins impactés par la hausse des taux». Autrement dit, ils peuvent se permettre de payer tout ou partie de leur achat comptant… «Pour des opérations d’acquisition-revente, il est vrai que le segment du luxe peut être préservé : il est probable que la valeur de ces biens haut de gamme se maintienne dans le temps, et donc que le risque de moins-value soit moins important», acquiesce Bertrand Desportes.
Un appel à une «foule» triée sur le volet
Si cette théorie se confirme dans la pratique, la plateforme anticipe des rendements (non garantis) qui pourraient se situer entre 11% et 13% pour ses opérations de dette privée – quand le financement donne lieu à l’émission d’obligations qui rémunèrent les investisseurs tout au long de l’opération, puis à la revente -, et jusqu’à 17% pour les opérations en «equity» (où les membres détiennent une part de l’actif). Soit dans les deux cas davantage que le rendement moyen du crowdfunding immobilier au premier semestre 2024, de 10,9%, selon le baromètre de Mazars et France FinTech.
Toutefois, si les futurs membres du Kretz Club peuvent espérer passer au travers de la crise du secteur, il n’y en aura pas pour tout le monde. Contrairement au financement participatif traditionnel, ouvert au plus grand nombre, la «foule» sera ici triée sur le volet. Alexandre Bruneau reconnaît que le club sera «réservé à des personnes qui connaissent déjà le secteur de l’immobilier». Dans les faits, tout le monde peut s’inscrire sur la plateforme : il faudra simplement répondre à un rapide questionnaire. «Le but est de tester un peu les connaissances des candidats, connaître leurs projets, et ce qu’ils attendent du club», explique le dirigeant.
Mais au-delà de la motivation, la capacité d’investissement sera également un critère clé. Pour pouvoir investir aux côtés de la famille Kretz, une cotisation annuelle de 2 000 euros est en effet demandée. Elle ouvre l’accès, bien sûr, aux opérations immobilières, mais aussi, entre autres, à une plateforme digitale, aux services d’un conseiller, et à des événements. Ainsi, pour que le jeu en vaille la chandelle et que le prix de l’abonnement soit intégralement remboursé, un patrimoine conséquent est nécessaire : «Pour rentabiliser 2 000 euros de cotisation, à 10% de rendement, il faut être sur une opération dans laquelle on a investi 20 000 euros minimum, ce qui est beaucoup pour un placement de diversification, qui en principe ne doit pas dépasser 5% de son épargne», rappelle Bertrand Desportes. Le rêve de se reconvertir dans l’immobilier de luxe n’est donc pas taillé pour tout le monde. Si vous souhaitez tenter l’aventure, une première vague de 500 candidats doit être sélectionnée dans les prochaines semaines, avant l’ouverture probable d’une nouvelle session d’inscription.
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