Montres de luxe : à Paris, une brigade traque des voleurs « de plus en plus violents »

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La scène n’a duré que quelques minutes, laissant les badauds et les vendeurs abasourdis. Dimanche 10 décembre, aux alentours de 10 h 45, deux hommes au visage dissimulé par des casques de moto ont fait irruption dans la très chic boutique Kith, en plein cœur du VIIIᵉ arrondissement de Paris. Après avoir aspergé les agents de sécurité de gaz lacrymogène, les braqueurs ont entrepris de casser les vitrines au marteau pour y dérober des montres de luxe et des bijoux. Le préjudice du vol a été estimé à plus de 600 000 euros, et le parquet de Paris a indiqué dans l’après-midi avoir ouvert une enquête, confiée à la brigade de répression du banditisme. Impressionnant, ce braquage est loin d’être isolé : selon une étude publiée en août dernier par la société britannique The Watch Register, qui recense l’ensemble des montres « volées ou manquantes » partout dans le monde, le nombre de montres de luxe dérobées a augmenté de 60 % au niveau mondial en 2022. Plus de 80 000 garde-temps se seraient évaporés dans la nature, pour un préjudice estimé aujourd’hui à plus de 1 milliard d’euros. Les Rolex restent les plus recherchées par les cambrioleurs, et représentent 44 % des montres volées. Viennent ensuite les modèles des marques Omega (7 %), Breitling (6 %), Tag Heuer (6 %), Cartier (4 %) et Patek Philippe (3 %).

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Depuis une dizaine d’années, la France n’échappe pas à cette explosion de vols : dans la capitale, un pic a même été constaté en 2021, avec « près de 300 saisines de montres de luxe effectuées par les équipes de la sûreté territoriale [ST] de Paris », indique à L’Express le chef de l’organisme, Romain Semedard. Au point que, depuis 2014, un groupe spécifique composé de neuf fonctionnaires de police, appuyé par deux autres groupes de la ST de Paris, est chargé d’enquêter spécifiquement sur ces vols et les réseaux de receleurs déployés à l’international. « Il faut comprendre que certains ont le prix d’un appartement autour du poignet : certaines montres atteignent les 300 000 euros », rappelle le commissaire divisionnaire, devenu malgré lui spécialiste des marques de montres de luxe.

« La violence est encore montée d’un cran »

Au fil des années, l’homme n’a pu qu’observer le développement des techniques des voleurs, et leur spécialisation sur le sujet. Au début des années 2010, les vols de montres étaient plutôt rares, spécialité de délinquants chevronnés « qui volaient les bijoux directement sur les clients, dans la rue ou dans le métro, en faisant une fausse prise de judo ou un pas de danse, sans que ces derniers ne s’en rendent compte ». Souvent originaires d’Algérie, ces pickpockets aux mains d’or revendaient ensuite directement les montres via une filière internationale, « passant par l’Algérie ou la Turquie avant de rejoindre les Emirats arabes unis ou les pays du Golfe ». « La plupart du temps, les voleurs récupéraient en quelques heures 90 % du montant de la montre dérobée », ajoute Romain Semedard.

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Car le marché de la montre d’occasion s’est largement développé. « Il n’est pas si facile de se procurer une montre Patek Philippe, Rolex ou Audemars Piguet, par exemple. Il ne suffit pas d’avoir de l’argent : vous devez être référencé, enregistré comme client. La raréfaction des produits a fait exploser le prix de certaines montres d’occasion », explique Marc Bitan, expert en horlogerie et directeur de la boutique spécialisée Les Champs d’or, à Paris. Une fois vendue, la montre peut ainsi doubler, voire tripler de valeur en fonction des modèles et des collections. « Les voleurs peuvent récupérer 20 000 euros en quelques secondes sur une montre, ils ont bien compris le business », ajoute-t-il.

Selon Romain Semedard, le marché a fini par attirer des organisations criminelles, au premier rang desquels la Camorra, la mafia napolitaine. Leurs méthodes sont plus violentes. « Souvent en deux-roues, ils repèrent les touristes aux montres luxueuses, frappent volontairement sur leur voiture ou leur rétroviseur, puis arrachent la montre », raconte le commissaire. Après le Covid, de jeunes voleurs, « très mobiles et souvent venus de banlieue parisienne », ont fait grossir leurs rangs. « La violence est encore montée d’un cran : on assiste à des vols avec passage à tabac, des étranglements jusqu’à l’évanouissement, voire des séquestrations directement dans les appartements des clients », explique-t-il.

Gérard Vautrin, spécialiste de l’horlogerie et patron de la boutique Olivine Prestige, a ainsi reçu plusieurs témoignages de clients violemment agressés pour des vols de montre. « L’un d’eux a même fini dans le coma. Les arrachages violents sont devenus monnaie courante », assure-t-il.

« Mêmes volées, les montres ont une cote »

Les réseaux sociaux n’ont fait qu’aggraver le phénomène : sur les stories Instagram ou TikTok, où les propriétaires postent en temps réel avec leurs produits de luxe, certains cambrioleurs repèrent les modèles les plus cotés, puis se rendent directement chez leurs victimes pour les dérober. Une des plus grosses affaires que les agents du « groupe montres » de la ST de Paris aient eues à traiter en 2023 concerne une montre Richard Mille d’une valeur d’environ 200 000 euros, dérobée à un touriste dans le hall de son immeuble du XXᵉ arrondissement. « Les agresseurs avaient repéré le produit quelques jours plus tôt à son poignet, et ont organisé le vol à l’avance », explique Romain Semedard. « Toutes les montres, même volées, ont une cote. Les voleurs les connaissent sur le bout des doigts, et s’intéressent uniquement aux modèles qui peuvent rapporter de l’argent », précise Gérard Vautrin, donnant l’exemple de la Rolex Daytona Paul Newman, qui peut atteindre « les 300 000 euros neuve, et être revendue en quelques heures à plus de 50 000 euros ».

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Si, dans l’affaire du XXᵉ, le bijou a pu être retrouvé, Romain Semedard admet que ce cas de figure est plutôt rare. « La plupart du temps, les montres disparaissent en quelques heures, et on ne les revoit plus jamais », précise le commissaire. Le montant des butins est parfois astronomique : la brigade a ainsi récemment travaillé sur le vol d’une montre Frédéric Jouvenot évaluée à 250 000 euros et dérobée dans le XIXᵉ arrondissement, ou encore sur une Richard Mille estimée à plus de 300 000 euros, volée dans le VIIIᵉ. A force d’enquêtes de voisinage, de surveillance téléphonique et de filatures, le phénomène semble légèrement s’estomper. Après le pic de 2021 constaté dans la capitale, environ 220 vols ont été traités par la ST de Paris en 2022, et « un peu moins d’une centaine » pour l’année 2023.

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