Les 93 Maisons de luxe françaises du Comité Colbert partagent la même ambition : être un référent en matière de responsabilité sociale, sociétale et environnementale. Autour de quatre thématiques, éco-conception, gestes verts, upcycling et remise à neuf, les Maisons échangent sur leurs actions en matière de développement durable. Dans ce premier volet, les porte-paroles de dix Maisons dévoilent comment l’éco-conception – une démarche qui permet de réduire les impacts négatifs d’un produit sur l’environnement durant tout son cycle de vie, mais en conservant ses qualités d’usage – s’est fait une place dans le processus de création de leurs pièces emblématiques.
Ruinart : pour un luxe responsable
En 2022, l’étui « Crayères », imaginé pour servir d’écrin aux bouteilles de la cuvée Dom Ruinart 2010 et signaler l’importance de ce millésime, marque le retour à un procédé ancestral de vieillissement des flacons sous bouchon de liège. « Cet étui est une sculpture entièrement en papier, avec un bouton d’attache qui permet de l’ouvrir et de le refermer », explique Violaine Basse, directrice marketing et communication de Ruinart, qui a collaboré à sa création. « Pour cette invention qui a demandé deux ans et demi de recherche et développement, nous n’avons pas déposé de brevet. Nous voulons inciter d’autres maisons à suivre notre démarche. » Onze fois plus léger que l’ancien coffret du Dom Ruinart, l’étui représente une réduction d’empreinte carbone de 62 %. Sa forme, obtenue par un procédé de compression, dans des moules, de pulpe de papier, naturellement blanc, non chloré, évoque les parois des crayères de Reims. Dans ces paysages souterrains à l’hygrométrie particulièrement stable, carrières de craie creusées par l’homme dès le Moyen Âge, reconnues comme patrimoine exceptionnel par l’Unesco, Ruinart laisse vieillir ses bouteilles.
Longchamp : un sac sur mesure biosourcé
Passée par la Chambre syndicale de la couture puis le Central Saint Martins College of Art and Design de Londres, Émilie Jacquet est directrice du studio maroquinerie de Longchamp depuis 2018. « Une stratégie d’entreprise écoresponsable est indispensable et fondamentale à mes yeux. J’essaie d’appliquer dans mon travail mes engagements personnels », souligne celle qui a fait, avec son équipe, sortir du studio en 2019 le My Pliage Signature, sac sur mesure personnalisable en toile 100 % polyester recyclé, avec un système d’impression sans utilisation d’eau. Ce fut un tremplin pour les sacs suivants. En 2021, le Pliage Green, biosourcé, avec un fil 100 % recyclé (fabriqué entre autres à partir de déchets plastiques collectés dans les océans), a donné l’élan à l’adaptation de ce procédé de fabrication à toute la gamme des Pliages. Grande satisfaction du studio : avoir créé du durable en respectant parfaitement l’esthétique originelle. Longchamp étend cette démarche sur tous ses produits aussi bien le PAP, que les accessoires ou encore les lunettes. Ces dernières sont en polyester recyclé et en résine végétale fabriquée à partir d’huile de ricin, limitant l’usage des produits issus du pétrole.
Louis Vuitton : privilégier un approvisionnement en matières premières certifiées
Les activités de Louis Vuitton se développent sur un champ vaste, du bagage, ancrage historique de la Maison depuis 1854, à la mode, la haute joaillerie, et jusqu’à la chocolaterie et la restauration éphémère. L’entreprise utilise quelque 500 matières premières. « J’adore la complexité », sourit sa directrice du Développement durable Christelle Capdupuy. Ingénieure chimiste, diplômée d’un master en Développement durable à Centrale Paris, elle crée les directions Développement durable de plusieurs multinationales françaises avant d’arriver chez Louis Vuitton. En 2022, la Maison a atteint, entre autres actions, le taux de 78 % d’approvisionnement en matières premières certifiées, visant l’objectif de 100 % en 2025. « Notre approche des impacts environnementaux est systémique. Il ne s’agit pas de faire plus, mais différemment et partout. La créativité doit être circulaire. » Par exemple, la seconde vie des équipements des vitrines et défilés sous forme de don à des associations impacte leur conception même, notamment le choix des matériaux. « On peut alors multiplier par dix la réutilisation des matériaux. »
Eres : des matières toujours plus vertueuses grâce à l’innovation
« Faire en sorte que la Peau Douce Naturelle soit de plus en plus présente dans les collections et s’assurer qu’elle réponde toujours aux exigences de qualité et aux attentes de nos clientes », telle est la mission de Stéphanie Van Ruyskensvelde, directrice des Opérations produits et Supply chain chez ERES depuis 2022. Avec un « devoir de veille », pour aller « toujours plus loin dans la transformation vers des matières toujours plus vertueuses grâce aux nouvelles connaissances et techniques ». L’échange et le collaboratif sont au coeur de la stratégie de cette cheffe d’orchestre de la production et de la logistique. « Un travail de collaboration et de partage permanent permet d’envisager des transformations intéressantes et progressives. Cela force à innover et à être créatif. » Jusque dans le domaine social. « Nous privilégions les “Made in” de proximité (France et Italie) avec un impact carbone plus bas, et nous entretenons des collaborations de longue durée avec tous nos partenaires. »
Bonpoint : des matières nobles, naturelles et pérennes
Directrice des ressources humaines et de la RSE de Bonpoint, Muriel Tollari donne l’impulsion aux équipes qui s’investissent dans le « processus d’amélioration continue permettant d’utiliser des matières plus durables et écoresponsables. » Comme le coton bio dans lequel sont confectionnés les bodys naissance. « Notre ADN est d’utiliser des matières nobles, naturelles, pérennes, qui ont toujours poussé à une forme d’éco-conception », rappelle-t-elle. Sans oublier « le recours à des savoir-faire d’excellence ». Muriel Tollari est l’une des initiatrices du programme Bonpoint Cherrysh, créé en mars 2020, lors du premier confinement, qui repose sur trois piliers : assurer le développement individuel et la performance collective par un engagement global et mutuel, réduire l’empreinte environnementale de l’ensemble de la chaîne de valeur et nourrir des partenariats durables avec des fournisseurs aux pratiques éthiques. Ce qui a pris la forme, entre autres, de formations de sensibilisation au développement durable et d’ateliers « fresque du climat ».
Pierre Hardy : le luxe vertueux jusque dans les détails
Pour cet ancien danseur « arrivé à la chaussure par jeu », « les changements de mode de vie sont des moteurs ». Conscient du fait que « l’écoresponsabilité est une question à laquelle on ne peut plus échapper », Pierre Hardy reconnaît : « Moi, en tant que créateur, ça m’a poussé dans des limites qui m’intéressent », « et c’est rapidement devenu ludique », embarquant toute son équipe dans l’aventure Planet. Son idée ? « Proposer une capsule de modèles iconiques réalisés le plus vertueusement possible. En repensant chaque détail, chaque étape et en se demandant comment les rendre écoresponsables, jusqu’au point d’équilibre entre le style, la ligne et le développement durable tout en restant fidèle à son allure. » Soit l’utilisation de gomme recyclée et recyclable pour les semelles, de nylon régénéré et de petites quantités de cuir au tannage végétal, sans chrome ni métal pour les doublures. Même les boîtes sont fabriquées localement, en papier certifié FSC, et les pochons en nylon recyclé. Car le luxe vertueux l’est jusque dans les détails.
Bernardaud : des pièces conçues pour durer
Ingénieur de formation, le jeune directeur des opérations Charles Bernardaud assume ses accointances avec les problématiques techniques et industrielles. Entre autres missions, il pilote le développement industriel de l’entreprise tourné vers une amélioration de son empreinte écologique et accompagne le développement de nouveaux usages du matériau comme les conditionnements, renouant ainsi avec la tradition des contenants hauts de gamme en porcelaine. Autant de « pots pour des cosmétiques, des flacons pour des vins ou des spiritueux, qui ne sont pas destinés à être jetés, mais rechargés ». « Leur conception complexe nous force à gagner en technicité et en performance », insiste-t-il.
Guerlain : la beauté durable
Passée par la finance verte et le WWF, Cécile Lochard, également autrice de Luxe et développement durable : la nouvelle alliance, rejoint Guerlain en 2019. Aujourd’hui directrice du développement durable de la maison à l’abeille, elle en pilote les efforts pour préserver la biodiversité, agir pour le climat, développer un impact sociétal positif et innover de manière durable. « Cela encapsule tous les bénéfices des travaux menés tant sur les formules, que sur le packaging auxquels nous ajoutons une démarche de transparence », explique-t-elle. Les contenants de certains produits de la gamme ultra-premium d’Orchidée Impériale Black, fabriqués en porcelaine de Limoges par la maison Bernardaud et déclinés en éditions artistiques signées par exemple Li Hongbo ou Kevin Germanier sont ainsi devenus rechargeables. « Les artistes se bousculent pour réinterpréter cette jarre éco-conçue », souligne Cécile Lochard en rappelant que si l’éco-conception a conduit Guerlain à « casser les codes du luxe », elle constitue aujourd’hui « le sens de l’histoire ».
Caron : privilégier les circuits courts
L’engagement responsable fait partie de l’ADN de la Maison Caron. En témoigne depuis 1982 le remplissage en fontaine des parfums iconiques tels que Aimez-moi comme je suis et la Collection Merveilleuse. Pour Jean Jacques, le parfumeur Maison, « le choix des matières premières est une préoccupation au quotidien. Je privilégie systématiquement un ingrédient naturel, éthique et responsable, disposant du label For Life (de EcoCert) ». Partenaire du laboratoire Monique Remy Naturals pour élaborer sa palette de matières premières, Jean Jacques a à coeur d’élaborer sa sélection d’ingrédients en toute humilité et transparence. « Je privilégie les circuits courts. Toute l’essence de la lavande utilisée dans le parfum Pour un Homme, surdosée à 61 %, vient des champs du producteur français Jérôme Boenle. » Rose, fleur d’oranger, santal et vétiver font également partie de ses ingrédients fétiches. La Maison Caron est toujours à la recherche de collaborations responsables. Depuis 2020, elle collabore avec l’association Coeur de Forêt.
Lesage : l’éco-conception textile, une aventure collective
Directrice du département textile de la Maison Lesage, Laura Arguelles se présente comme « le chef d’orchestre de l’éco-conception au sein de Lesage ». « Je donne le tempo aux filateurs et aux tisseurs : nous avançons ensemble dans cette démarche vertueuse, dans le respect de la création. » Car l’éco-conception textile est inévitablement une aventure collective. « La création éco-responsable est un travail vertueux, mené en coopération sur toute la chaîne de la filière textile. Mon équipe et moi avons bénéficié d’une formation Ecocert mais également de l’expertise des équipes RSE Chanel. » Sans oublier « les fabricants de fils, aujourd’hui très engagés sur ces sujets, par conviction ou par impératif business, ce qui nous a ouvert des possibilités ». « Sourcer les matières écoresponsables, les tisser et responsabiliser nos partenaires sur ces enjeux », tel est le quotidien de Laura Arguelles. Un moteur plus qu’un frein au final : « L’écoresponsabilité est une variable qui rajoute du challenge et de l’innovation à notre quotidien car la création est notre priorité ! »
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