Des Maldives à Paris, l’hôtellerie de luxe, toujours plus confidentielle

, Des Maldives à Paris, l’hôtellerie de luxe, toujours plus confidentielle

Publié le 25 nov. 2023 à 14:00

Difficile de distinguer ce qui se cache derrière cette porte cochère bleue sise sur l’une des cinq places royales parisiennes, bien connue des amateurs de belles pierres. Tout juste repère-t-on la lettre C sculptée dans le fer forgé, ou, si l’on s’approche, le majordome près d’un escalier.

Bienvenue au « 1, Place Vendôme », le nouvel hôtel parisien de la famille Scheufele, également propriétaire de la maison de joaillerie Chopard. Quelque 2.500 m2, cinq chambres et dix suites à partir de 1.400 euros, un jardin d’hiver et des salons pensés par le décorateur français Pierre-Yves Rochon, qui a mis en scène la crème de l’artisanat français, des boiseries des Ateliers de la Chapelle aux rideaux et tentures murales signés Philippe Coudray, en passant par les peintures décoratives de l’Atelier Mériguet-Carrère.

« Echelle humaine », l’exclusivité en plus

« Nous proposons tous les services d’un palace, mais dans un esprit maison de famille, avec une échelle humaine et des expériences exclusives », expose Amélie Allardon, directrice de l’établissement. Un lieu où l’on ne risque pas de peiner à trouver une table pour dîner puisqu’il est exclusivement réservé aux résidents de l’hôtel et à quelques clients privilégiés de Chopard. « Lors de la dernière semaine de la mode parisienne, les clients qui petit-déjeunaient dans le salon ont fini par échanger leurs cartes de visite comme on le ferait entre membres d’un club », glisse Amélie Allardon.

Le « 1, Place Vendôme » se niche derrière cette porte bleue sans signe distinctif. 

Le « 1, Place Vendôme » se niche derrière cette porte bleue sans signe distinctif. © Gregory Copitet

Le modèle du cinq-étoiles – avec sa centaine de chambres et ses espaces communs ouverts à la clientèle extérieure – ne serait-il plus assez chic ? Le luxe ne serait-il plus suffisamment luxueux ? Face à une clientèle de plus en plus fortunée mais également de plus en plus exigeante, les hôtels doivent se surpasser pour proposer toujours plus d’exclusivité.

Une demande en plein boom

Le cabinet Deloitte vient de mener une étude sur le rapport des ultra-riches au voyage. Rassemblant les fortunes estimées à plus de 30 millions de dollars, ce segment concerne 579.000 personnes dans le monde en 2022. Leur moyenne d’âge ? 64 ans. Et seulement 11 % de femmes. Les Américains, du Nord et du Sud, se positionnent en haut de la liste, les Asiatiques et les Européens s’y font un peu moins nombreux, les Moyen-Orientaux poursuivent leur forte montée en puissance et on note l’émergence des Africains et des Indiens.

« Tout cela va clairement évoluer dans les années à venir », analyse Andreas Scriven, spécialiste de l’hôtellerie et des loisirs chez Deloitte. Cette cible n’a jamais autant consacré de budget à ses voyages, avec 19,2 % des dépenses annuelles. En miroir, le secteur hôtelier s’en trouve dopé, avec un marché des établissements cinq étoiles évalué à 201 milliards de dollars en 2022.

Recherche d’authenticité

Même constat chez The Leading Hotels of the World – organisme qui regroupe 400 hôtels de luxe indépendants dans le monde – dont le chiffre d’affaires a atteint 1 milliard de dollars en 2022, le plus important depuis sa création en 1928. Son tarif moyen pour une nuit s’est envolé de 45 % par rapport à 2019, atteignant 832 dollars en 2022. La PDG, Shannon Knapp, note ainsi que « les clients voyagent davantage, dépensent plus mais nourrissent également de plus grandes attentes ». Et Andreas Scriven de détailler ces dernières : « Privilégier des exp�ériences rares et sur mesure, moins ostentatoires, des choses que l’on ne trouve pas sur Internet. Il y a quarante ans, la clientèle américaine haut de gamme ne rêvait que de dormir dans un hôtel Hilton ou Marriott, avec les mêmes standards et les mêmes services quelle que soit la destination. Aujourd’hui, le luxe, c’est une équipe authentique, une architecture vernaculaire, une cuisine locavore… » Et si possible, un lieu qui n’a pas été partagé sur les réseaux sociaux.

L'« owner's villa », sur l'îlot privé de « Cheval Blanc Randheli ».

L’« owner’s villa », sur l’îlot privé de « Cheval Blanc Randheli ».© DR

Jörg Zipprick, cofondateur de La Liste, qui établit un classement des plus beaux hôtels dans le monde, suit le secteur depuis des années. « Les réseaux sociaux ont banalisé le luxe. Lorsqu’un client fortuné voit une influenceuse de 25 ans invitée dans une suite prestigieuse, il a forcément envie d’autre chose. Et comme le segment des très riches est en plein développement, les hôtels haut de gamme réfléchissent à créer des annexes avec des services différents. Le palace est presque devenu banal ! », s’exclame-t-il.

Service ultrapersonnalisé

Chez « Cheval Blanc », on peaufine ainsi l’art de recevoir avec des concierges rebaptisés « alchimistes », un service ultra-personnalisé et un nombre de clés volontairement limité. Pour aller plus loin, la chaîne hôtelière du groupe LVMH (propriétaire des « Echos ») a prévu dans chacune de ses cinq « Maisons » une option d’hébergement encore plus confidentielle. A Randheli, aux Maldives, à l’écart des 46 villas de l’île principale, c’est un îlot d’un hectare abritant une maison de 2.200 m2, accessible uniquement par bateau. A Paris, un ascenseur privé conduit directement à L’Appartement avec ses sept chambres, sa piscine avec vue ou encore sa salle de projection. Des produits discrètement signalés sur le site avec des prix « sur demande ».

L'un des neuf appartements de l'Hôtel de Pourtalès, à Paris. 

L’un des neuf appartements de l’Hôtel de Pourtalès, à Paris. © Stephan Julliard

Une quête d’exclusivité qui explique le développement de ces petites unités à la décoration confiée aux meilleurs artisans, avec plus de deux personnes au service d’une chambre (un véritable challenge lorsque l’on connaît les problèmes de recrutement actuels), mais aussi de petites attentions comme la taie d’oreiller brodée au nom du client ou encore le papier à son en-tête. « Ce 100 % sur-mesure renoue avec l’esprit de l’hôtellerie à la française du début du XXe siècle. A l’image des débuts du ‘Ritz’, ouvert en 1898, où les clients pouvaient demander tout et n’importe quoi, même dîner d’un pied d’éléphant comme le raconte une anecdote restée célèbre », analyse Jörg Zipprick.

L' « Aman New York » et sa terrasse-jardin. Sur la rue, l'entrée de l'hôtel le plus cher de la ville se remarque à peine. 

L’ « Aman New York » et sa terrasse-jardin. Sur la rue, l’entrée de l’hôtel le plus cher de la ville se remarque à peine. © Robert Rieger/Aman

Après avoir été le théâtre du très médiatisé cambriolage des bijoux de Kim Kardashian en 2016 , du temps où il était un club privé, l’« Hôtel de Pourtalès » à Paris vient d’ouvrir officiellement ses portes au public. Enfin, à un certain public, puisque les réservations se font uniquement sur demande, sous réserve d’acceptation. Kathlene Guerrache, directrice commerciale du lieu, confie : « Récemment, nous avons refusé un chanteur international venu pour faire la promotion de son dernier album, afin d’éviter les hordes de fans devant l’hôtel, mais cela ne l’empêchera pas de venir chez nous à l’occasion d’un voyage personnel. »

Le refus de la surexposition

Devant cet établissement de la chic rue Tronchet, pas un panneau ni un voiturier. On s’annonce en appelant la réception qui escorte au fond de la cour, où se trouve la discrète entrée. « Après des années de surexposition, les clients ne souhaitent plus montrer leur fortune comme avant, ils ne veulent plus être observés, voire pointés du doigt pour leurs voyages. A l’extravagance en vogue il y a une dizaine d’années, on préfère désormais la discrétion… sans pour autant revoir ses exigences », observe Kathlene Guerrache.

A l'« Aman Venise ». L'opulence du palais vénitien se cache, côté rue, derrière une très discrète enseigne.

A l’« Aman Venise ». L’opulence du palais vénitien se cache, côté rue, derrière une très discrète enseigne.© Aman

A l’« Hôtel de Pourtalès », neuf appartements entre 75 m2 et 367 m2 sont proposés à partir de 2.000 euros et jusqu’à 15.000 euros en période de fashion week, avec majordome 24 h/24, concierge, massages en chambre, attentions ultra-personnalisées. « Nos clients ont évidemment les moyens de dormir dans les palaces environnants, mais ils préfèrent venir ici, se sentir comme à la maison. » Dans la même veine, la « Maison Villeroy » a ouvert deux kilomètres plus loin dans un hôtel particulier avec onze clés et un restaurant étoilé.

Porte dérobée

Ce « quiet luxury », la chaîne hôtelière Aman le cultive depuis toujours. Dans ses adresses urbaines, pas d’entrée grandiloquente. A New York, on peut passer plusieurs fois devant l’entrée sombre et le portier sans saisir que s’y cache l’établissement le plus cher de la ville (accessible uniquement aux clients et aux membres du club). Quant à celui de Venise, si l’on arrive par la terre, il faut s’armer de patience pour repérer la petite plaque indiquant l’entrée de l’hôtel nichée au fond de la calle Tiepolo. L’exclusivité Aman se distingue également dans les expériences développées sur mesure pour chaque établissement. Comme emprunter la porte dérobée de l’« Aman Summer Palace » en Chine pour pénétrer discrètement au petit matin, avant la foule, dans le Palais d’été de Pékin. Cela n’a pas de prix… Ou presque.

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