C’est un mouvement important qui vient de se produire dans la planète luxe, sur laquelle règnent depuis de nombreuses années les multinationales françaises (LVMH, Kering, Hermès, Chanel). A Wall Street, Tapestry a lancé une OPA sur son concurrent Capri Holdings, valorisant ce dernier à 8,5 milliards de dollars. Ces groupes inconnus, hormis parmi les professionnels du secteur, contrôlent une ribambelle de marques, qui elles le sont.
Tapestry, détient ainsi les griffes Coach, Kate Spade, et Stuart Weitzman. Et Capri, la cible, contrôle Versace, Jimmy Choo et Michael Kors. C’est d’ailleurs ce dernier, qui a créé le groupe en 1981, et s’est payé Versace en 2018 pour 2 milliards de dollars. La dernière acquisition de Tapestry, Kate Spade, s’est elle révélée guère profitable.
Consolidation aux Etats-Unis
C’est donc une vraie consolidation qui est en cours de l’autre côté de l’Atlantique, avec la création d’un géant du luxe 100% américain qui devrait réaliser l’équivalent d’une douzaine de milliards de dollars de chiffre d’affaires, la direction évoquant dans sa communication financière un résultat d’exploitation annuel combiné de 2 milliards de dollars.
A noter que même si les Etats-Unis ont perdu tout début 2021 un fleuron avec la vente de la maison Tiffany à LVMM pour 15,8 milliards de dollars, les acteurs américains ne sont pas les bras ballants face au quasi-oligopole français. Estée Lauder a par exemple raflé l’an dernier, au nez et à la barbe de Kering, la marque Tom Ford, moyennant un chèque de 2,8 milliards de dollars.
La question est de savoir si le nouvel ensemble, la finalisation de l’opération aura lieu en 2024, est en mesure de rivaliser avec les géants français. Pas évident. D’abord, l’opération est financée presque exclusivement sur dettes (8 milliards de dollars), ce qui réduit d’autant la marge de manœuvre du nouveau groupe qui va devoir investir s’il veut rivaliser avec les leaders du secteur.
Capri est plutôt mal en point. Avant le déclenchement de l’OPA, son cours de bourse avait dévissé de 40% depuis le début de l’année. Les investisseurs sont d’ailleurs plutôt dubitatifs. Si l’action Capri s’est logiquement alignée sur le prix de l’offre, celle de Tapestry a décroché de 16% en une séance, ramenant sa capitalisation à 8 milliards de dollars.
Scepticisme du Financial Times
Le Financial Times, dans un éditorial, se montre très sceptique, insistant sur le fait que les marques concernées ne sont pas particulièrement prestigieuses, à l’exception notable de Versace. Or, l’ambition du nouveau groupe est bien de se déployer à l’international.
« L’affaiblissement de la demande a exercé une pression sur Tapestry et Capri, qui se tournent désormais vers les marchés internationaux pour soutenir leur croissance. Il y a plus de sécurité à se lancer dans des projets internationaux audacieux à deux », estime Neil Saunders, directeur général de GlobalData, interrogé par le site spécialisé Fashion Network. Il est vrai que la demande de produit de luxes dans les deux immenses marchés que sont les Etats-Unis et la Chine tend à s’essouffler.
Outre la conquête de la planète, c’est bien la diversification géographique qui aurait motivé ce rapprochement selon John Idol, le patron de Capri: « nous aurons des ressources plus importantes et des capacités pour accélérer notre internationalisation tout en préservant l’ADN unique de nos marques”. Il est vrai que les deux entités sont complémentaires géographiquement, l’une étant bien implantée en Asie et l’autre en Europe. Au total, le nouveau groupe sera présent dans « plus de 75 pays », précise encore le communiqué.
Poids plume face à LVMH et Kering
Si l’opération arrive à son terme -l e secteur est habitué aux coups de théâtre – les géants français doivent-ils s’inquiéter? A priori non, puisque le nouvel ensemble reste un poids plume. La capitalisation combinée des deux sociétés est de 14 milliards de dollars, contre 417 pour LVMH (actionnaire minoritaire de Challenges) ou 71 pour Kering.
Mais la création de ce groupe marque peut-être la fin d’une époque: celle de l’hémorragie pour le luxe américain. Outre Tiffany, les maisons Marc Jacobs, DKNY, Donna Karan ou Thom Browne ont été vendues avec plus ou moins de bonheur a des groupes non-américains. Bernard Arnault, en tout cas, croit au potentiel de ce pays et de ses créateurs. L’acquisition de Tiffany et la nomination des créateurs Virgil Abloh puis Pharrell Wiliams chez Vuitton en sont deux exemples éclatants.
Dans la dernière édition de la revue Politique internationale, le PDG et actionnaire de LVMM rappelle que les Etats-Unis sont le premier marché du groupe. Mais pas seulement: « Les Etats-Unis constituent l’un des laboratoires qui nous permettent d’identifier les tendances qui vont émerger dans le monde ».
Et Bernard Arnault, qui a jadis vécu outre-Atlantique, de rappeler qu’il détient « douze maisons américaines, treize sites de production, plus de 1000 boutiques et emploie près de 42 000 collaborateurs ». Pas question de laisser ce marché aux acteurs locaux: « Investir et nous y développer est une stratégie de long terme que nous mettons en œuvre depuis plus de trente ans, et nous n’en sommes qu’au début ».
Les dirigeants de Tapestry-Capri sont prévenus.
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