La Zone d’expression prioritaire (Zep) élabore ces récits avec des jeunes de 14 à 30 ans, lors d’ateliers d’écriture encadrés par des journalistes. Ces témoignages sont ensuite publiés par des médias. Ouest-France a choisi d’être l’un d’eux. Tous les mois, le premier mardi, dans le journal et sur ouest-france.fr, on peut lire ces récits de vie, comme celui de Maëlle, 19 ans.
« Imagine : tu as 12 ans et tu habites dans un petit village de 600 habitants en Bretagne. Tu es à 45 minutes de la plus grande ville, Rennes. Comment fais-tu quand tu veux pratiquer un sport ou une activité artistique ? C’est une vraie question ! Enfant, je rêvais de faire de l’escrime ou de l’équitation. Non seulement il n’y avait pas d’offre, mais en plus c’était inaccessible en termes de coût.
Je cherchais un sport qui allait me permettre de me défouler, sans être trop cher, et qui correspondait aussi à mes horaires. Un vrai défi ! Des loisirs à la carte et à profusion, ça n’existe pas dans mon village. Ou alors il faut faire comme tout le monde, du foot, du handball ou de la danse. Sauf que les sports de ballon, ce n’est pas mon truc. »
« Je ressentais vraiment l’envie de me défouler »
« J’avais envie de trouver un sport où on se sent libéré après une séance, un sport qui allait me renforcer. Parce que le collège, pour moi, c’était une période compliquée. Jeune, naïve, réservée, j’avais des difficultés à m’affirmer et à m’intégrer. Je ressentais vraiment l’envie de me défouler, de faire un sport qui me ferait oublier le collège pendant quelques instants !
MON sport, j’ai fini par le trouver. Des séances de sports de combat se sont ouvertes dans la salle des fêtes de mon village. Le prix était abordable, les horaires fonctionnaient avec mon emploi du temps, j’ai donc commencé le taekwondo. Je n’avais jamais entendu parler de ce sport, c’était l’inconnu et ça me stressait un peu. Mais comme dit ma mère, qui ne tente rien n’a rien. J’ai donc décidé d’essayer au moins sur une séance, découvrir et voir si ça me plaisait. »
« Ce sport m’a aussi renforcée physiquement »
« Cette séance s’est transformée en… cinq années ! Pendant cinq ans, tous les vendredis soir, j’ai pratiqué le taekwondo. Je ressentais enfin cette liberté que je cherchais, ce sentiment, après une séance, que plus rien ne peut nous atteindre.
Le taekwondo m’a forgé une carapace, a protégé ma sensibilité, m’a donné le courage de ne plus me laisser faire et d’oser entreprendre en allant au-delà de ma panique et de ma timidité. Ce sport m’a aussi renforcée physiquement. J’ai davantage de force et d’agilité, alors que jusque-là j’avais des muscles minuscules et la souplesse d’un bambou. »
« Le confinement a tout stoppé »
« Ce sport, je ne le pratiquais qu’avec des adultes, qui avaient entre 25 et 60 ans. J’étais la plus jeune. Ça ne me gênait pas du tout, au contraire. Être avec des adultes me permettait de moins me prendre la tête. Je me demandais moins ce que l’on pouvait penser de moi comme je le faisais avec des personnes de mon âge. Ils avaient une sagesse, une volonté de transmettre et une bienveillance qui me faisaient du bien.
Cinq ans plus tard, alors que ce sport était devenu important dans mon quotidien, le confinement a tout stoppé. À la sortie de la crise sanitaire, il n’y avait plus assez de personnes inscrites au taekwondo. Impossible pour le club de maintenir les séances dans mon village. Vraiment, faire du sport à la campagne, c’est un luxe ! »
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