Nous avons rencontré le fondateur du mouvement de la Transition, Rob Hopkins, dans les locaux du Transition Town Totnes, de la localité anglaise. Et plus précisément dans son espace restauration, baptisé avec humour, le Edgy Veggie, le végé stylé.
C’est quoi la transition ?
Il s’agit d’un ensemble de communautés qui réinventent le monde. Nous ne faisons pas que dans l’intellectuel, nous agissons. Nous offrons un cadre aux gens pour qu’ils entreprennent des choses, dans le but de proposer…
Nous avons rencontré le fondateur du mouvement de la Transition, Rob Hopkins, dans les locaux du Transition Town Totnes, de la localité anglaise. Et plus précisément dans son espace restauration, baptisé avec humour, le Edgy Veggie, le végé stylé.
C’est quoi la transition ?
Il s’agit d’un ensemble de communautés qui réinventent le monde. Nous ne faisons pas que dans l’intellectuel, nous agissons. Nous offrons un cadre aux gens pour qu’ils entreprennent des choses, dans le but de proposer un nouveau modèle économique et social. Ce n’est pas comme une franchise « Coca-Cola », tout le monde est libre de se l’approprier à sa manière. Ce qui a aussi ses limites.
L’un des principes de base de la transition est de parvenir à rompre avec notre dépendance aux énergies fossiles. Comment faire ?
La pollution de l’air tue 40 000 personnes par an en Angleterre, et environ autant en France, donc il faut arrêter de brûler des choses ! Nous devons augmenter notre production d’énergies renouvelables, rendre les transports publics gratuits pour tous, et avoir des voitures électriques pour tous. Ces dernières existaient d’ailleurs déjà dans les années 1970, mais elles n’ont été commercialisées qu’il y a dix ans, preuve qu’il y a des freins à la transition, car les lobbies des compagnies de gaz et de pétrole sont très puissants.
« Ce qu’il nous manque, c’est une soif de changement »
Chaque citoyen doit-il aussi se remparer de son destin ?
Tout à fait. Ce qu’il nous manque, c’est une soif de changement. Nous avons fait les choses faciles pour réduire notre empreinte carbone, mais maintenant, il faut rentrer dans le dur. Or, dès que cela devient compliqué, les politiques rebroussent chemin.
Il y a dix ans à Paris, on voyait rarement les gens circuler à vélo, mais aujourd’hui c’est très courant, car les bonnes infrastructures ont été mises en place. C’est pour cela que j’encourage aussi les gens à faire appel à leur imagination. Si ce à quoi vous pensez ne vous paraît pas ridicule, alors vous n’êtes pas assez ambitieux !
Alix Fourcade
Que pensez-vous de l’Accord de Paris, qui remonte déjà à 2015, et où les pays membres des Nations Unis se sont fixés d’atteindre une neutralité carbone en 2050 ?
Je pense qu’il faut se fixer une date plus proche : 2030, car ce n’est pas demain qu’il faut agir, c’est maintenant ! Bien sûr que ce n’est pas évident et que la transition demande des financements, mais il faut parler de ce qui marche. Je suis d’une nature très positive et je pense que l’écoanxiété est un luxe que l’on ne peut plus se permettre, il faut aller de l’avant.
Quel lien entretenez-vous avec la ville de Totnes ?
J’aime vraiment Totnes. Je crois que j’y ai lancé la transition comme une déclaration d’amour. J’y vis avec ma femme et mes enfants y vont à l’école. Certaines personnes disent que c’est une ville de hippies, mais c’est surtout une ville tolérante, où l’on peut explorer de nouvelles choses avec des gens extraordinaires. Quand on y a lancé le mouvement, on ne pensait pas que le modèle allait s’exporter dans le monde entier. Le fait que cela existe encore est un miracle et j’en suis fier. Nous avons essuyé des échecs, comme le Totnes pound, une monnaie locale lancée en 2007 que nous avons dû abolir en 2019, mais cela nous a permis de développer un sens beaucoup plus aiguisé de ce qui marche et de ce qui ne marche pas.
La plupart des acteurs de la transition sont des personnages assez âgés. N’avez-vous pas l’impression d’être dépassé et que d’autres mouvements, comme Extinction Rébellion, attirent davantage les jeunes ?
Peut-être que le côté plus activiste de groupes comme Extinction Rébellion stimule davantage les jeunes, mais ça ne veut pas dire que c’est la seule solution pour lutter contre le réchauffement climatique. La vérité, c’est que personne ne sait ce qu’est la bonne approche, nous luttons simplement tous pour mettre fin au système actuel, tout en construisant le monde d’après. Donc, ce n’est pas l’un ou l’autre, mais plutôt l’un et l’autre. Dans beaucoup de cas, d’ailleurs, on retrouve les mêmes personnes dans les réseaux de la Transition et ceux de Extinction Rébellion.
La méthode Hopkins
Rob Hopkins ponctue ses interventions avec plusieurs exercices collaboratifs pour impliquer son auditoire. Avec sa « machine à avancer dans le temps », par exemple, il demande aux participants de se plonger en 2030 et de donner leur vision du futur. Lors de son intervention en avril dernier à Bordeaux, tout le monde s’est prêté au jeu : « Je vois une prairie place des Quinconces », « de la végétation partout », « davantage de rues piétonnes », a-t-on pu entendre dans l’assemblée. « Mon but est de susciter une nostalgie du futur, explique le professeur, pour que les gens aient envie que les choses changent. »
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